Le secteur du bâtiment et de l’habitat n’échappe pas à la question de l’adaptation au numérique. Maryline Vonarx, directrice des ressources humaines du Groupe Qualitel a accepté de répondre à nos questions pour nous expliquer comment son groupe adopte les pratiques numériques et comment les équipes s’y préparent.
Pouvez-vous me présenter Qualitel et votre activité ?
Maryline Vonarx : Qualitel est une association créée en 1974 par l’État pour promouvoir la qualité de l’habitat. Notre activité maîtresse est la certification des logements que nous assurons au travers de notre filiale commerciale, CERQUAL Qualitel Certification qui est le premier organisme certificateur de France. Mais nous avons aussi une activité d’évaluation et d’expertise que nous assurons au travers de notre filiale QIOS qui intervient sur de nombreux programmes immobiliers comme expert indépendant pour optimiser la performance technique des constructions et qui propose toute une gamme de services dans les domaines de l’acoustique, la thermique, l’environnement, la santé, la réduction carbone ou encore le numérique. Enfin, nous avons récemment acquis un organisme de formation spécialisé dans le domaine de la construction durable et de l’efficacité énergétique pour aider les acteurs de l’immobilier et de la construction à monter en compétence et mieux s’adapter aux évolutions de leurs métiers et de leur environnement.
Pouvez-vous me donner des exemples concrets de comment le numérique impacte votre activité ?
MV : Dans le cadre de sa transition numérique et de l’adoption du BIM dans le secteur du bâtiment, QUALITEL participe depuis 2013 au développement de ce nouvel outil de modélisation des informations du bâtiment, au service de l’habitat. Convaincue que ce nouveau processus de travail constitue un fort levier d’amélioration de qualité de l’habitat, QUALITEL a initié en 2015 le projet nommé QualiBIM. Ce dernier vise à faciliter l’intégration des exigences de certification dans les projets et à apprendre à utiliser les outils numériques « BIM » pour réaliser ses missions d’évaluation et de vérification des opérations.
Ensuite on a un projet qui concerne le carnet numérique, sur lequel nous travaillons avec d’autres partenaires et qui sera un peu la carte vitale du bâtiment, de votre logement, ce qui permettra de pouvoir intégrer tout un nombre de données qui concernent votre logement : connaitre les matériaux qui ont permis sa construction, le niveau de qualité acoustique, les actes de propriété, etc. dans la perspective de la maintenance ou de la rénovation de votre logement puisque aujourd’hui ce sont des plans, des actes papiers.
Il y a aussi la dématérialisation de notre métier, pour tendre vers le zéro papier.
Et chez Qualitel, comment s’est manifestée la problématique du numérique ? Qu’est-ce qui a présidé à faire de l’acculturation au numérique via le TANu ?
MV : On le voit bien, la mutation numérique est un mouvement global qui concerne tous les métiers et aujourd’hui l’ensemble de l’activité économique. Chez Qualitel, on trouvait cela nécessaire de s’assurer que les collaborateurs soient à l’aise avec la digitalisation et les nouveaux outils que nous avons progressivement mis en place :
Tout d’abord, nos activités sont dématérialisées : tous les collaborateurs sont équipés d’un PC et nombreux sont ceux qui travaillent avec leur PC portable, en situation d’itinérance.
Nous essayons d’utiliser au maximum le cloud, nous essayons de diminuer au maximum les emails, donc nous avons mis en place des outils de travail comme Office 365. Cela oblige à comprendre comment cela fonctionne, ce qu’est le cloud, etc.
Par ailleurs, au quotidien, nous utilisons un ERP maison et des portails qui structurent un peu toute notre activité : pour pouvoir facturer, contrôler les rapports d’évaluation qui sont faits par nos sous-traitants qui travaillent pour nos clients titulaires de la certification, etc. Notre ERP maison impacte tous types de métiers, des métiers supports mais aussi plus opérationnels.
Enfin, on a mis en place le télétravail. C’en est au stade expérimental mais là aussi cela demande beaucoup d’agilité : il faut se connecter au réseau, savoir utiliser les outils maison, etc. Bien sûr, nous avons un service IT que nos collaborateurs peuvent contacter s’ils ont un problème technique mais le télétravail implique quand même une grande adaptabilité et de devoir se familiariser avec de nombreux outils.
Les collaborateurs étaient donc confrontés à l’utilisation de ces outils, certains étaient plus ou moins à l’aise avec ça, et on a trouvé important, au-delà de cette utilisation du numérique au quotidien, effectivement de faire ce qu’on appelle de l’acculturation digitale.
On a regardé un peu ce qui se faisait sur le marché et on a trouvé ça vraiment intéressant de faire le test TANu d’autant qu’après, on a accès à l’Ecole TANu.
Comment avez-vous déployé le TANu au sein de Qualitel ?
MV : On avait déjà acculturé dans un premier les managers du comité exécutif notamment dans le cadre de formations via un SPOC et puis on s’est dit que c’était important aussi d’acculturer l’ensemble des collaborateurs et du coup avec le test du TANu c’est très pratique et simple : les collaborateurs reçoivent un email, ils se réservent un peu de temps pour passer le test et ensuite ils poursuivent cette acculturation en faisant de l’auto-formation avec l’Ecole TANu.
Tous les collaborateurs du groupe ont donc passé le test et utilisent l’Ecole TANu. Notre démarche est de l’utiliser à l’intégration d’un collaborateur : lorsqu’on recrute un collaborateur, dans le cadre de son parcours d’intégration, on l’inscrit au TANu qui lui permet d’accéder à l’Ecole. On utilise ainsi le TANu depuis 2017, maintenant on l’utilise régulièrement.
Tous les profils que vous intégrez chez Qualitel sont donc concernés ?
MV : Oui. Nous utilisons le test pour les métiers supports : tout ce qui est Direction Administrative et Financière (DAF), tout ce qui concerne les profils informatiques (ingénieurs développeurs, architecte JAVA, ingénieur système et réseau), on a une direction communication et marketing, une direction des ressources humaines, des profils d’assistanat (assistanat technique, assistanat commercial), une direction études et recherche, qui produit les référentiels de certifications les études et observatoires pour nos clients. Mais aussi nos ingénieurs d’affaires, donc des profils commerciaux, des profils techniques, des personnes issues de formations techniques bâtiment.
Au total, 219 utilisateurs ont déjà passé le test chez nous.
Comment parlez-vous du TANu à vos collaborateurs ?
Comme on considère que c’est un élément important pour le développement des compétences, nous en avons fait l’un des indicateurs de notre accord d’intéressement. C’est-à-dire que nous avons souhaité que les collaborateurs s’investissent sur le sujet et nous leur avons proposé de faire un volume de 7h, une journée de formation liée à l’Ecole TANu pour l’année 2018.
Chaque collaborateur déclare donc le temps qu’il a passé en formation avec l’Ecole TANu et, en fonction de ces déclarations, à la fin de l’année 2018 on regardera si l’indicateur a été atteint et ça sera pris en compte pour le calcul de la prime d’intéressement.
C’est une motivation en lien avec le temps qu’ils auront passé à s’auto-former. C’est une dynamique qu’on essaye de diffuser, d’insuffler et c’est vrai que le levier de l’indicateur de l’accord d’intéressement est un bon levier, cela permet de se consacrer un peu de temps sur ces sujets.
On a mis l’Ecole TANu à disposition, après si certain souhaitent poursuivre sur d’autres sujets ou d’aller plus loin, ils en ont la possibilité. On veut vraiment apporter ce réflexe d’aller chercher l’info sur internet, s’auto-former.
Pour faciliter le développement des compétences, on met donc l’accent sur l’auto-formation et on souhaite d’ailleurs introduire dans notre plan de formation plus de formats en « blended » qui permettent d’allier l’e-learning et le présentiel, ou faire de l’e-learning pur. On souhaite vraiment pouvoir favoriser cet accès qui est simple à la formation via internet.
On intègre le TANu dans quelque chose de plus global, le TANu est un des leviers qui nous permet d’acculturer nos équipes au digital et leur montrer le champ des possibles. On les accompagne, on les soutient dans cette démarche d’acculturation et on mesure leur appétence à s’auto-former par le biais de cet indicateur de l’intéressement.
Pouvez-vous m’en dire plus sur les autres actions que vous menez chez Qualitel pour former vos collaborateurs au numérique ?
MV : Aujourd’hui dans le cadre du plan de formation, on prévoit pour des collaborateurs, et notamment nos managers, des formations digitales sous forme de SPOC (Small Private Online Course). Quand on a des sujets spécifiques on recourt aussi à des formations digitales.
En plus de ces formations digitales, nous avons aussi mis en place du e-learning avec 360Learning au niveau de notre direction de la certification : cela permet de former à nos référentiels les sous-traitants que nous mandatons pour aller évaluer et vérifier in situ le respect du cahier des charges une fois que le programme immobilier est monté ».
Quels sont les premiers retours sur le TANu ?
MV : On a commencé à lancer les tests du TANu début 2017, on avait inscrit tous les collaborateurs présents. puis au fil des arrivées on a intégré le test dans notre parcours d’intégration. Ensuite on avait fait une présentation anonyme à l’ensemble des collaborateurs pour qu’ils puissent avoir une idée des résultats du test et on leur a présenté l’Ecole TANu et son fonctionnement.
Ce que nous retenons c’est qu’il y a des gens qui sont plus ou moins à l’aise, et ce n’est pas forcément une question d’âge. Bien sûr, tous les métiers des IT sont très à l’aise mais ce qui est bien fait avec l’Ecole TANu c’est que le collaborateur a un parcours personnalisé en fonction des points à améliorer et qu’il y retrouve toutes les thématiques : soit il continue avec son passeport pour aller vers les sujets où il est le moins à l’aise soit il navigue vers d’autres sujets qui l’intéressent. Avec le passeport c’est assez parlant donc ça permet au collaborateur d’avoir son petit passeport, de savoir là où il est plus à l’aise.
Vous avez une vraie stratégie de formation au numérique de vos équipes. Comment mesurez-vous ces efforts ?
MV : Mesurer les efforts investis en formation est toujours un peu compliqué mais on va pouvoir le constater en regardant par exemple s’il y a plus d’appétence pour les formations digitales dans le cadre du plan de formation, puisqu’au début lorsqu’on a démarré le sujet de la formation digitale le problème était d’aller jusqu’au bout du parcours. On souhaitait intensifier ce recours à la formation digitale, on va voir là si la résistance est moindre par rapport à ce format de formation.
Enfin, au travers de notre gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, on a, dans nos définitions de fonctions, ce qu’on appelle le socle de compétences numériques minimales, qui permet au manager, notamment par l’utilisation de l’Ecole du TANu et l’utilisation des outils au quotidien, de voir s’il est acquis ou non.
Merci à Clara Moreno.